L’acteur de renommée internationale Jimmy Jean-Louis était en Guadeloupe, début octobre, où il a présidé le jury du Cinestar International Film Festival 2024, une vitrine dédiée aux voix émergentes et singulières des Outre-mer. JOHO est allé à sa rencontre.
C’est en toute décontraction que Jimmy Jean-Louis, qui vit à Los Angeles, a reçu l’équipe du JOHO quelques heures avant la projection de son film, “Jimmy goes to Tropico”, au Fort fleur d’Epée. “ Un documentaire que j’ai coréalisé avec Rachid Dhibou, produit et dans lequel je joue.”
Il était présenté hors compétition au Cinestar International Film Festival 2024, dont l’acteur d’origine haïtienne présidait le jury. “Je n’avais pas pu participer aux deux dernières éditions, j’avais d’autres choses de prévues. Mais cette année, le timing était parfait.”
Le Cinestar International Film Festival met en lumière le talent antillais dans le cinéma. Cette année, une vingtaine de films étaient en compétition dans différentes catégories. Jimmy Jean-Louis a apprécié la sélection et tout particulièrement deux films. Il en a dit plus à JOHO.
Quels sont les films en compétition qui ont retenus votre attention ?
Il y a deux films qui m’ont parlé directement. Tè an nou, qui évoque les problématiques de la Guadeloupe, les difficultés pour sa population d’avoir une voix à part entière et de se faire entendre de la France. J’ai trouvé que ce film expliquait des choses intéressantes à ce sujet. Et avec Kidnapping Inc, on arrive à comprendre la société haïtienne et la problématique de tout ce phénomène de kidnappings. C’est très bien fait, très bien réalisé et très bien joué. Je pense que c’est un film qui va peut-être devenir culte avec le temps. En plus, c’est un premier film.
Que pensez-vous du cinéma antillais et de ce festival qui y est dédié ?
Dans le documentaire Jimmy goes to Tropico, j’essaye d’expliquer ce qu’est le cinéma des Tropiques et il y a vraiment un pays qui sort du lot, la République dominicaine, qui fait énormément de films. J’ai tourné pas mal dans la Caraïbe (Martinique, Guadeloupe, Cuba, Haïti, République dominicaine…) et c’est un cinéma qui me parle. Je viens de la Caraïbe, c’est mon identité. Le cinéma antillais est très riche. Je pense qu’on a des histoires à raconter, une richesse culturelle à montrer. Et s’il y a un moyen de promouvoir ce cinéma, je le ferais plus que volontiers. Un événement comme le Cinestar International Film Festival permet de donner de la visibilité à ces films et le public peut découvrir des talents et des sujets incroyables. J’en ai découvert lors de ce festival.
Vous présentiez un autre film hors compétition, Au revoir. De quel sujet traite-t-il et quel accueil a-t-il reçu ?
Le film Au revoir est réalisé par Ronny Castillo, qui réside en Bretagne, mais vient de la République dominicaine. C’est un réalisateur très pointu. On s’est rencontré à un festival et on s’est mis d’accord pour faire ce film. On l’a tourné entre la Bretagne et la République dominicaine. Il parle d’amour, des relations, de la fidélité et de la mort. Il a été présenté pour la première fois au festival d’Angoulême. Là, c’est sa deuxième sortie seulement. On va l’exploiter dans les mois à venir, mais pour l’instant, on ne fait que des festivals. Au revoir a été très apprécié par le public du festival. Les retours sont très positifs. Les gens étaient très curieux du sujet et de la manière dont il a été traité.
Outre Au revoir, quelle est votre actualité cinématographique ?
J’ai pas mal de films qui vont sortir dans les prochains mois. The fire and the moth, que j’ai tourné au Nigéria et à Londres. Mélodrama, tourné en République dominicaine, doit sortir l’année prochaine. Et il y a aussi Killing of the nation, que je viens de tourner au Panama. Il parle de l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, tué en 2021. Il va montrer une certaine réalité, vérité, pour trouver qui sont vraiment les coupables. Aïssa Maïga, qui est très connue en France, joue Martine, ma femme dans le film. On a un très beau casting.
Ce film, est-ce une façon de poursuivre votre engagement pour Haïti ?
C’est très dur ce qui se passe en Haïti. C’est le pays qui a initié le combat des pays noirs. Cela fait mal au cœur de le voir dans cette situation 220 ans plus tard. J’ai créé une association en 2008, Hollywood Unites for Haïti. On a travaillé très dur pendant une dizaine d’années, mais malheureusement la situation a été tellement difficile dans le pays ces dernières années qu’on n’a pas pu tenir. Mais je reste un ambassadeur itinérant pour Haïti. Je suis très concerné par tout ce qui se fait, se passe. C’est un combat que j’essaye de mener, même à travers l’art.
Dans votre actualité également, la sortie d’une biographie, Héros, qui raconte votre parcours des bidonvilles de Port-au-Prince jusqu’aux étoiles d’Hollywood…
Le livre sera disponible dans toutes les librairies, partout en France, à partir du 24 octobre. On est à la recherche de distributeurs pour sa diffusion dans d’autres pays, notamment anglophones. Je l’ai écrit en français parce que cette langue a plus de nuances et puis j’ai grandi en France. C’est mon histoire, dont je suis le héros, d’où le titre. Ce livre revient sur les grandes étapes de ma vie et les difficultés que j’ai rencontrées. Elle n’a pas été un long fleuve tranquille et c’est ce que les gens vont découvrir. J’ai connu beaucoup d’échecs. A Paris, j’ai été SDF si je puis dire quand j’avais la vingtaine. J’ai dû trouver la manière de m’en sortir et de continuer à croire en moi. On vit dans une société où on est plus écrasé par le système qu’éduqué. En tant que banlieusard, parti d’un endroit impossible où on ne peut pas imaginer grandir, pour s’en sortir, c’était très difficile. Difficile, mais pas impossible. C’est le message de ce livre. Chacun de nous devrait être le héros de sa propre vie.
Article rédigé par Isabelle Chevalier