« Le bonifieur, l’un des meilleurs cafés du monde »

Le bonificateur, un café 100 % Guadeloupe, est un cru d'exception. Philippe Chaulet, caféiculteur et torréfacteur en Côte-sous-le-Vent, se bat pour relancer la culture de ce produit haut de gamme.

Le bonifieur, l’un des meilleurs cafés du monde

Qu’est-ce que le café bonificateur et pourquoi porte-t-il ce nom ?

« C’est un café 100 % Guadeloupéen. Un arabica typique proche du café d’origine introduit dans l’archipel par Gabriel de Clieu en 1721. Il est planté, cultivé, réalisé, séché et torréfié en Côte-sous-le-Vent. Il a un arôme bien particulier. Il est long en bouche, avec peu d’amertume et un petit goût de chocolat. C’est un café d’exception. Quand la Guadeloupe en exportait, il était mélangé avec des cafés d’autres origines, moins bons, pour en améliorer le goût. D’où son nom de bonificateur. »

Qu’est-ce qui lui donne cet arôme si particulier et en fait un café aussi qualitatif ?

« Comme pour le vin, le terroir est important. Le goût n’est pas le même d’une vallée à l’autre. Tout dépend du sol, de l’exposition, de la pluviométrie. La culture en sous-bois (agroforesterie) et la couleur de la cerise participent également au goût du bonifieur. Et c’est aussi une question de savoir-faire : l’entretien, le temps passé à laver la cerise, la façon de la sécher, de torréfier les grains… Tout ça fait que nous avons l’un des meilleurs cafés du monde. »

Jadis florissante, la culture du café à périclité en Guadeloupe. Comment l’expliquez-vous ?

« En 1790, la Guadeloupe était l’un des premiers producteurs mondiaux de café. Mais par la suite, la production n’a pas d’arrêté de décroître. Il y a plusieurs explications, notamment la concurrence de l’Amérique latine et des Petites Antilles. Également la maladie qui a frappé les caféiers vers 1850. Et puis les cyclones successifs qui ont détruit les plantations de la Côte-sous-le-Vent (1928, 1956, 1966). Comme il faut 5 ans pour qu’un caféier reprenne, la banane a pris le dessus. »

Qu’en est-il de la production de café bonificateur aujourd’hui ?

« Dans les années 60, la Guadeloupe produisait encore 200 tonnes de café bonificateur. Aujourd’hui, il n’y a plus que quatre gros producteurs en Côte-sous-le-Vent (Chaulet, Crâne, Vanibel et La Grivelière) et la production annuelle est estimée à moins de 10 tonnes, soit moins de 160 sacs. Elle est à son plus bas niveau à cause de la sécheresse et d’un petit scarabée qui rentre dans les grains de café vert et s’en nourrit, le scolyte. On cherche une solution pour l’éliminer. »

Pensez-vous que le café est une culture en redevenir en Guadeloupe, comme la vanille et le cacao ?

« C’est mon cheval de bataille. Aujourd’hui, le café bonifieur est cultivé sur une trentaine d’hectares en Guadeloupe et mon rêve, c’est qu’on atteigne 100 hectares dans 10 ans. La production redémarre avec de jeunes ingénieurs agronomes qualifiés. Pour ma part, je suis en train d’acheter 40 hectares de terres agricoles en Côte-sous-le-Vent, dont 20 seront plantés en café. A priori, le café devrait être éligible aux fonds européens cette année. Cela devrait contribuer à sa relance, d’autant que les subventions pour le sucre et la banane vont s’arrêter. »

Comment imaginez-vous l’avenir de la filière guadeloupéenne du café ?

« J’imagine un café d’habitation, comme un château pour les vins, avec un emballage Guadeloupe et des étiquettes qu’on déclinerait. Il y aurait le café Habitation Grigne aux vents, le café Habitation La Joséphine, le café Habitation Man Lisa, le café Habitation Vanibel… L’idée, c’est de produire localement un café de qualité, labellisé. Un produit de niche haut de gamme qui serait vendu dans les épiceries fines et aux grands restaurants. L’objectif, c’est de produire plus et d’exporter un produit fini qui permet aux planteurs d’en vivre largement. »

Isabelle Chevalier

Le bonifieur, l’un des meilleurs cafés du monde
Le bonifieur, l’un des meilleurs cafés du monde

Philippe Chaulet produit actuellement 5 tonnes de café bonificateur par an, exclusivement vendu en Guadeloupe. (@Jean-Bernard Valcy)

Le secret d’une torréfaction réussie

« Chaque degré de température change le goût. Plus vous torréfiez les grains de café, plus ils ont le goût de brûlé et plus leur couleur est noire », explique Philippe Chaulet, co-gérant de la société familiale Café Chaulet. La torréfaction du café bonificateur est particulière. « Il se torréfie moins que ceux originaires d’Amérique latine, sa couleur est d’un marron plus clair. » Les maîtres torréfacteurs de Café Chaulet savent d’expérience à quel degré et à quelle couleur arrêter la cuisson.

Une recette jalousement gardée

Café Chaulet torréfie également des grains de café importés d’Amérique latine et centrale (Brésil, Nicaragua et Costa-Rica). « Un mélange de quatre arabicas précis », Philippe Chaulet, vendu dans le fameux sachet vert. La recette, propre à la famille, est jalousement gardée. « On obtient un café dont le goût est assez proche de celui du café bonificateur. »

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