Par Isabelle Chevalier – Photographies Fred Mogin
Le chef Jimmy Bibrac a réalisé une recette pour le JOHO magazine. Il a choisi de mettre en avant deux épices emblématiques de la Guadeloupe, le curcuma et le piment doux, pour sublimer son plat aux saveurs iodées.
« On mange déjà avec les yeux, les couleurs sont très belles et les odeurs superbes. » Le chef Jimmy Bibrac a reçu JOHO magazine dans son restaurant gastronomique créole Ô Z’Epices. Pour ce nouveau numéro sur le thème des sens, il a concocté un plat entre terre et mer, autour des saveurs et des senteurs de la Guadeloupe. « Un didiko revisité avec des produits simples et sains. »
Pas de sardines au menu, mais du balaou et des palourdes de mangrove. « Deux produits assez puissants en goût » sélectionnés par Jimmy Bibrac pour leurs saveurs iodées. Pour les sublimer, il a choisi deux épices « aux couleurs et aux senteurs magnifiques, le piment doux et le curcuma ». La garniture, quant à elle, est composée de fruits de saison : papaye, mangue et concombre.
« C’est une recette assez facile à réaliser », explique le chef en levant les filets de balaou qu’il s’apprête à mariner et à cuire dans l’huile de roucou. « On met du sel, du poivre, de fines lamelles de curcuma et de piment, puis de la peau de pamplemousse, « coupée très fine pour qu’il n’y ait pas trop d’amertume. Et enfin, on ajoute une bonne dose d’huile. »
Tandis que la préparation, filmée, cuit au four, le maître restaurateur enchaîne avec la réalisation d’un blaff de palourdes. « On casse une gousse d’ail pour libérer les saveurs. On casse aussi le curcuma dans la préparation. On ajoute du persil, un tout petit peu d’huile. Et on couvre pour compresser toutes les saveurs. »
Tradition et modernité
Pour réaliser ce plat, Jimmy Bibrac a travaillé les produits à l’ancienne. « Le goût vient de nos origines. Pour moi, c’est vraiment très important de coller mes recettes à ce que faisaient les mamies. Cette base me permet de revisiter les plats créoles d’antan, de les faire évoluer tout en conservant l’âme. » En travaillant cette assiette, explique le chef, « l’idée est d’allier tradition et modernité. »
Le dressage terminé, Jimmy Bibrac ne peut s’empêcher de goûter. « On sent bien le côté iodé et les épices apportent de la couleur, de la senteur, des saveurs. Le curcuma rappelle la terre. Le piment doux a une saveur végétale et épicée, mais pas piquante. » Ce plat, agrémenté de quelques palourdes décortiquées cuites à l’étouffée, est un régal à la fois visuel, olfactif et gustatif.
La cuisine créole selon Jimmy Bibrac, c’est « un mélange de plein d’ingrédients pour, finalement, réussir à faire ressortir un goût. Et aujourd’hui, c’est ce côté iodé, entre terre et mer. Ce qu’on a préparé, c’était simple et, en même temps, cela créé une émotion. Et c’est ce que je veux offrir à chaque personne qui vient dans mon restaurant ».
S’il a voulu faire ce métier, explique le maître restaurateur « c’est dans le but de partager. Après ma mise en place, généralement, je suis en salle avec mes clients. J’aime bien présenter mes plats, expliquer dans quel esprit je les cuisine. » Avec des produits locaux de qualité, issus d’une agriculture raisonnée, et bons pour la santé.
« FAIRE DU BIEN AU CORPS »
Si les plats de Jimmy Bibrac sont savoureux, les produits qu’il cuisine sont également bons pour la santé, comme le curcuma. « Si je l’ai choisi pour cette recette, c’est aussi parce que c’est un alicament (un pansement gastrique, un énergisant et un antioxydant). » Le jardin créole regorge de plantes et d’herbes aux vertus médicinales. « Par exemple l’atoumo – dont le nom signifie bonne pour tous les maux -, la citronnelle, le basilic, la sauge, le gros thym, le bissap, le gingembre… Quand je réalise un blaff, plutôt que d’ajouter de l’eau, je fais une infusion avec des plantes que j’ajoute à mon court-bouillon. J’utilise aussi des infusions dans la préparation de mes viandes ou sur un légume que j’aurais besoin de glacer. Cela va donner du goût, la puissance du terroir et en même temps cela fait du bien au corps. » C’est ça aussi la philosophie de la cuisine gastronomique créole de Jimmy Bibrac.
« Notre leitmotiv, c’est la valorisation du patrimoine à travers l’art culinaire. » Jimmy Bibrac
La recette du chef
Pour quatre personnes :
- 4 balaous
- 850 g de palourdes
- 70 g de piment doux
- 150 g de curcuma frais
- ½ concombre
- 1 pamplemousse
- 200 g d’huile de roucou
- 1 bouquet garni
- 1 mangue verte
- 2 gousses d’ail
Préparation :
- Laver, écailler, vider, puis lever les filets de balaous. Les disposer sur une plaque qui va au four. Les assaisonner : sel, poivre, une gousse d’ail écrasée, 35 g de piment doux haché finement. Ajouter 70 g de curcuma émincé, 1 zeste de pamplemousse émincé finement et 150 g d’huile de roucou. Ensuite, masser légèrement, puis ranger les filets de manière rectiligne sur la plaque.
- Ensuite, filmer la plaque de manière hermétique, puis faire une cuisson au four à 100 degrés durant 30 minutes, puis réserver au frais.
- Réaliser un blaff de palourdes : dans une casserole ajouter une cuillère à soupe d’huile de roucou, 35 g de piment doux écrasé, une gousse d’ail écrasée, quelques branches de bouquet garni et à convenance ajouter du curcuma ciselé. Faire revenir légèrement.
- Une fois revenu incorporer les palourdes, puis cuire à couvert. Une fois que les palourdes sont ouvertes, décortiquer et récupérer quelques palourdes pour la décoration. Ensuite, mixer le reste des palourdes dans le jus de palourdes chinoisés.
Garniture :
- Réaliser de fines lamelles de concombre, de mangue à l’aide d’une mandoline. Assaisonner légèrement de sel, de poivre et d’huile de préparation des balaous.



